la Maison des Feuilles : qui a essayé ?

L'an dernier, j'ai lu un véritable ovni littéraire, que j'ai adoré au début mais qui m'a laissé un peu sur ma faim : c'était la Maison des Feuilles de Mark Z. Danielewski, sorte de roman où tout est déconstruit racontant une histoire de maison étrange dans laquelle l'intérieur est beaucoup plus grand que l'extérieur et dont l'exploration va révéler des dangers insoupçonnés...


Si quelqu'un l'a lu, j'aimerais avoir son avis sur cette "chose" : une véritable expérience qu'il est malaisé de mener à son terme tant la structure et la mise en page laissent penser à un rassemblement de notes sur un livre déjà annoté ; on passe son temps à tourner les pages pour aller des annexes à un autre chapitre avant de reprendre la lecture, puis à retourner aux notes de fins de chapitres...à d'autres moments, on doit retourner le livre pour lire verticalement, la typographie change avec l'auteur présumé...



Sans rire, au début, j'ai eu du mal, puis ensuite on découvre la véritable trame sous-jacente (celle qui est évoquée en 4 ème de couv) et on essaie d'aller au devant de cette exploration. Le problème vient surtout de toutes les annotations et des ruptures dans le récit lorsque le premier auteur reprend la parole.
Ce n'est pas un livre dont on peut lire 5 pages chaque soir avant le dodo, parce que chaque fois, on est obligé de revenir 10 pages en arrière pour le reprendre .

hum pas vraiment le genre de livres que j'aimerais avoir à mon chevet...

Si le style est aussi difficile que l'aménagement du livre..

J'aime l'idée de la maison que je trouve séduisante mais la présentation me paraît en effet fort ardue et quelque peu indigeste pour bien se plonger dans l'histoire.

Disons que ça demande un effort certain pour s'y plonger, d'autant qu'en plus de nombreuses notes de fin de chapitres, il y a des annexes comme des lettres manuscrites, des rapports médicaux, des cartes, des photos...

Mais la trame principale, l'exploration de la Maison, est amenée de façon fort étrange : c'est en fait le visionnement d'un film réalisé par un très grand photographe qui part explorer cette partie hors de l'espace mais à 'intérieur de chez lui. Et ce film est présenté comme quelque chose qui existe réellement (on nous parle de bande annonce, d'un extrait qui a couru les festivals). A côté, on a le cheminement intérieur d'un jeune qui tombe sur un livre annoté qui va profondément perturber sa psyché...

C'est parfois assez flippant et ça ne ressemble à rien de ce que je connaissais.

Personnellement, j'ai adoré la manière dont toute la première partie du récit est amenée, mais la fin m'a laissé un peu déçu, je dois dire. Un peu comme si c'était "Tout ça pour ça?"
Le concept est sympa, mais un peu casse-gueule et surtout.. poudre aux yeux.

Une présentation faite sur Premonition.fr par Renaud Martin :

Citation :

"Je fais encore des cauchemars. D’ailleurs, j’en fais si souvent que je devrais être habitué depuis le temps. Ce n’est pas le cas. Personne ne s’habitue vraiment aux cauchemars". C’est sur ces pensées lovecraftiennes que s’ouvre La Maison des feuilles, premier roman de l’américain Mark Z. Danielewski, écrit en pas moins de douze années. Il suffit de feuilleter ce livre volumineux (près de 700 pages) pour comprendre qu’il ne s’agit pas d’une œuvre ordinaire. Véritable labyrinthe de récits, de réflexions, de notes, croquis ou citations, trois niveaux de narrations s’y enchevêtrent, se croisent et s’emmêlent au fil des pages.

D’abord celui du narrateur principal, Johnny Errand, jeune tatoueur junkie et intellectuel, qui, suite à la mort d’un vieillard aveugle nommé Zampano, découvre dans une de ses malles un curieux manuscrit qu’il va lire, annoter et commenter afin de le publier.

Ensuite celui de ce mystérieux Zampano, qui étudie et décrit dans son livre monstrueux le célèbre film expérimental Navidson Record, réalisé par un certain Will Navidson qui, cessant sa vie dangereuse de reporter, décide de filmer lui même son emménagement dans une maison de Virginie, occasion pour lui de reconstruire sa vie avec sa femme et ses deux enfants.

Et c’est de ce film que naît l’horreur, une horreur par le vide, l’infini, le froid, l’invisible, la folie : un jour en faisant des mesures, Will découvre avec incrédulité et effroi que sa maison est plus grande à l’intérieur qu’à l’extérieur. Peu de temps après, alors que toute la famille s’était absentée quelques jours, une mystérieuse petite pièce sombre, vide et glaciale apparaît, et un couloir qui mesurait un jour trois mètres en mesurera une vingtaine le lendemain. Navidson entreprendra lui-même quelques vaines expéditions puis engagera des explorateurs professionnels pour venir à bout de ce qui s’avère être un labyrinthe glauque et interminable. Voilà ce qui est filmé et raconté dans ce Navidson Record, commenté et analysé par Zampano dans son manuscrit, et enfin lu et annoté par Johnny qui, au fur et à mesure de ses découvertes, sombre dans la démence.

Déjà culte aux Etats Unis (les textes ayant même été publiés par l’auteur sur internet avant leur première parution), ce livre de Danielewski est une excellente alternative aux romans plus traditionnels du genre : changeant de forme en permanence (comme la maison), le lecteur pourra ainsi, en se perdant dans certains passages complexes où le récit est encombré de notes et de citations, passer vingt minutes sur une page, puis lire les vingt pages suivantes en une minute. Remarquablement traduit, à la fois conceptuel et accessible malgré les plusieurs lectures nécessaires pour en venir totalement à bout, La Maison des feuilles est au même titre que le pire cauchemar de tout un chacun : inoubliable.

Nicolo a écrit:

Personnellement, j'ai adoré la manière dont toute la première partie du récit est amenée, mais la fin m'a laissé un peu déçu, je dois dire. Un peu comme si c'était "Tout ça pour ça?"
Le concept est sympa, mais un peu casse-gueule et surtout.. poudre aux yeux.

Ouais, c'est pour ça que je disais que j'étais resté sur ma faim. Mais l'expérience en elle-même valait d'être tentée, je trouve, au point que je recherche des livres du même genre.

Casse-gueule ? Effectivement, c'est risqué : je suppose que de nombreux lecteurs potentiels ont reposé le livre avant même de l'acheter, effrayés par la mise en page. Je dois dire que c'est au contraire ce qui m'a attiré : la curiosité.

La fin n'est sans doute pas à la hauteur, cela dit.

J'ai quand même bien aimé, mais c'était sûrement pas inoubliable comme l'autre le dit dans son article plus haut.
J'ai déjà oublié l'intrigue, ne restent que quelques images confuses alors que je ne l'ai lu qu'il y a deux ans.
par contre, l'intrigue d'Emphyrio de Jack Vance me reste gravée au fond de l'âme et du coeur

Oui, c'est un peu pareil : la façon dont l'intrigue est délayée me laisse plus en souvenir des impressions assez vagues... et la satisfaction d'en être venu à bout.

ca me rappelle vaguement un roman intitulée saints and madmen (Titre ???????????????)

si christophe duchet était là, il vous en parlerait mieux que moi !!!!!!

Nicolo a écrit:

par contre, l'intrigue d'Emphyrio de Jack Vance me reste gravée au fond de l'âme et du coeur

Haaaaaaaaaaa ! Nicolo ! La prochaine fois que je passe par Ankara je te le dis avant !

A partir de Mai/Juin prochain, ce sera Istanbul

JessKaan a écrit:

ca me rappelle vaguement un roman intitulée saints and madmen (Titre ???????????????)

si christophe duchet était là, il vous en parlerait mieux que moi !!!!!!

Il y a un livre de Jeff Vandermeer intitulé City of Saints and Madmen. Tu parlais de ça ? Lien ici.

pas lu ce livre (d'ailleurs je lis pas grand chose en ce moment, c'est une honte, mais ch'suis épuisée) mais le coup de la présentation justement ça m'a l'air sympa, ça fait un peu 'livre qui se mérite'... ceci dit à voir que vous avez été déçus par la fin, ça ne motive pas trop.

Nicolo a écrit:

A partir de Mai/Juin prochain, ce sera Istanbul

Adjugé !

Wolvie a écrit:

pas lu ce livre (d'ailleurs je lis pas grand chose en ce moment, c'est une honte, mais ch'suis épuisée) mais le coup de la présentation justement ça m'a l'air sympa, ça fait un peu 'livre qui se mérite'... ceci dit à voir que vous avez été déçus par la fin, ça ne motive pas trop.

Attention, je relativise. Je dirai que la fin n'est peut-être pas à la hauteur de toute la tension (et l'attention) accumulée par la lecture de l'ouvrage. Disons que c'est une déception toute relative. Mais l'expression que tu as utilisée est tout à fait juste : le livre se mérite, on est vraiment content, presque fier, d'être arrivé au bout, surtout si on est passé par toutes les annotations et annexes. Ce n'est pas un opus qu'on peut lire en diagonale.

J'ai essayé et j'en suis sorti vivant et sain d'esprit... du moins... je le crois

Cool ! Des impressions ?

Vance a écrit:

Cool ! Des impressions ?

Hé bien tu les as déjà eu... plus qu'un livre c'est une expérience, une épreuve et une très grande joie que de s'atteler à cet ouvrage d'une richesse rare et au suspense prenant. De plus, offrant différentes histoires dans des styles différents et pourtant complémentaire le récit est véritablement ouvert à toutes les personnalités...

Perso j'ai adoré...

Merci de ta contribution. J'aimerais bien réessayer un truc aussi imposant, d'ailleurs.

Bonjour,
La Maison des feuilles est un roman exceptionnel. En voici, sur mon blog, une critique raisonnablement expérimentale : http://findepartie.hautetfort.com/archive/2005/04/27/la_maison_des_feuilles_mark_z.html
Cordialement.

Merci. C'est un peu comme pour des rescapés d'un naufrage : avoir partagé cette expérience (et en être sorti !) ne peut que rapprocher.

Très pertinente analyse, dont je partage la plus grande partie. Félicitations pour la mise en page et les commentaires.